Le 23 juillet 2022, le Grahlf avait organisé un parcours dans la proximité de Billom, en Toscane d’Auvergne : le château de Montmorin, l’église de Glaine-Montaigut ainsi que Chauriat étaient au programme.
Le château de Montmorin
Le groupe est accueilli par un monument commémorant un seigneur du lieu, vétéran des Croisades. En attendant la guide, une petite discussion est engagée avec le propriétaire du château, M. Philippe Dubus. Ce dernier nous apprend qu’une partie du site ne nous sera pas accessible, des ouvriers y travaillant. En effet, les ouvriers remontent une voûte qui servira à relier deux sections d’une canalisation d’eau pour remettre en eau la citerne de 50 m3. Cette eau permettra par la suite de faire de la chaux sans avoir à utiliser l’eau du robinet.
La guide étant arrivée, le groupe passe de l’autre côté du rempart pour entrer dans la basse-cour. Dans celle-ci, la guide nous raconte rapidement l’histoire du château et de sa famille éponyme.
Certainement construit en bois, le château est édifié en pierre aux XIIe et XIIIe siècles, époque de la majorité des vestiges visibles. Le château est défendu naturellement sur trois de ses côtés et est composé de deux parties : une première enceinte, contre laquelle viennent s’adosser des bâtiments et qui délimitent une basse-cour ; une seconde enceinte qui cerne le logis seigneurial. Ces constructions sont toutes réalisées en basalte extrait sur place et en arkose acheminée depuis la plaine. Du côté Est, l’édifice présente une muraille massive flanquée de 4 tours circulaires ou semi-circulaires. Selon le schéma philippien, on pénètre dans l’enceinte par une porte percée entre deux tours rondes. La petite cour intérieure est cernée de bâtiments réhabilités dans lesquels a été aménagé un musée. Le seigneur habitait dans une résidence protégée par une seconde enceinte, surmontée d’un second chemin de ronde. Cette enceinte présente du côté Est trois tours semi-circulaires.
L’accès entre la basse-cour et la partie noble a disparu et nous n’en savons rien. Le donjon primitif, construit directement sur le rocher en basalte, est actuellement pratiquement arasé (n’en subsiste que le rez-de-chaussée), sans que nous sachions s’il s’agit là du fruit de l’action du temps, d’un accident ou d’un acte délibéré. À l’Ouest du site s’élevait la chapelle castrale devenue église paroissiale. Elle ne fait pas partie du domaine de l’actuel château et n’est donc pas visitable en même temps que celui-ci.
Compte-rendu de Erwann Rolhion
Glaine-Montaigut
Située entre Billom et Clermont, aux confins de la Limagne et du Livradois, l’église de Glaine-Montaigut est mentionnée pour la première fois avec son clergé en 1234 dans le testament d’Astorg de Moissat. Au XVIe siècle, elle est attestée comme siège d’un prieuré, rattaché à celui de Sauviat, dépendant de Saint-Michel de l’Écluse. Elle est classée Monument Historique en 1903.
Formant un ensemble harmonieux, l’église couverte de tuiles, présente un beau chevet roman édifié en pierre de taille assemblée en grand appareil.
Ce chevet est constitué d’une abside et de deux absidioles semi-circulaires ornées de pilastres saillants et surmontées de corniche largement débordantes soutenues par des modillons à copeaux que l’on retrouve au niveau de la travée de chœur et la nef.
Les fenêtres chevet sont surmontées d’un cordon de billettes qui les relie entre elles.
C’est une construction de la seconde moitié du XIe siècle : on a parlé pour cet édifice de transition entre Art Carolingien et Art Roman auvergnat. La démolition en 1903 d’un porche, bâti en 1888 pour agrandir l’édifice, a permis de retrouver la façade munie d’un portail marqué d’une archivolte torsadée, d’une fenêtre axiale et de deux contreforts pour signifier la division tripartie intérieure.
À l’intérieur, la nef de 2 travées est rythmée de gros piliers rectangulaires surmontés d’impostes, la voûte en berceau plein cintre sans doubleau repose sur des murs percés de baies et les bas-côtés sont voûtés en demi-berceau. La nef datant du XIe siècle est complétée par un transept couvert d’une coupole sur trompes, avec arc diaphragme percé d’une baie jumelée du côté de la nef. Au XIIe siècle, fut ajouté le chevet tripartie avec son abside bordée d’absidioles. On remarquera des chapiteaux ornés de sculptures d’une qualité (oiseaux, sirènes, atlantes…) témoignant de l’influence des églises romanes majeures d’Auvergne.
En 1992, la restauration de l’intérieur a permis de décaper l’enduit de ciment grisâtre qui recouvrait l’ensemble des murs et piliers ainsi que le badigeon bleu ciel du cul de four. C’est ainsi que furent retrouvées des traces de couleurs sur les arcs et dans la 1ère travée du bas-côté sud. Ces décors de petites rosaces ont été reportés au niveau des grandes arcades de la nef et de leur support, des percements et du carré du transept, le restaurateur a pu reconstituer la polychromie médiévale avec l’alternance de claveaux noir et blanc, ocre et jaune.
La restauration du cul de four a fait apparaitre une grande peinture que l’on peut situer autour de 1200, peinture « a fresca » dont les traces de la sinopia en noir sont bien visibles. Il s’agit d’une libre adaptation de la Deisis dans un style d’une grande monumentalité.
Le Christ en Majesté trône, sans mandorle, sur une large banquette munie de l’habituel coussin rond. Il bénit de sa main droite et tient le Livre fermé. À une échelle plus petite, à sa droite paraît Marie et à sa gauche Saint-Jean le Baptiste. Saint-Jean l’Évangéliste accompagne Marie et son symétrique est Saint-Pierre, reconnaissable à ses clés.
La Deisis est une des icônes les plus célèbres du Monde Byzantin des XIe et XIIe siècles, qui occupait le centre d’une iconostase et signifiait intercession et supplication comme le suggèrent les gestes symétriques des mains tendues de Marie et Saint Jean le Baptiste vers le Christ. Le peintre n’avait pas négligé les détails ainsi qu’en témoignent le voile à plis cassés à la byzantine de Marie, les poignets des tuniques du Christ et de Marie, le galon de la tunique de l’Évangéliste, la reliure à cabochons du Livre. La Vierge s’inscrit dans cette longue lignée des Theotokos, ces mères de Dieu byzantines au regard douloureux et implorant, et montrant le Christ de leurs mains tendues vers lui.
Compte-rendu de Colette Omerin et Dominique Roux
Chauriat
Le fort villageois. Chauriat, dont le seigneur était l’évêque de Clermont, fut doté, dès la fin du XIIIe siècle de franchises, et semble avoir été entouré d’un fossé (mentionné en 1282).
En 1367, les habitants avaient construit un fort, et en 1396, les deux églises et le cimetière qui les séparaient ont été fortifiés. Au XVe siècle, le fort fut remplacé par une enceinte collective percée de quatre portes dont il reste de rares traces. Au XVIIIe siècle, les fossés furent comblés.
Le site clunisien. C’est au début du XIe siècle que l’évêque de Clermont fit donation de biens situés à Chauriat à l’ordre de Cluny. Il existait alors 2 églises, St-Pierre, Ste-Marie, et une chapelle dédiée à Ste-Marcelle. L’église dédiée à Pierre est choisie pour être au cœur du monastère à ériger et Julien de Brioude en devient le saint patron. L’établissement relevait du prieuré de Sauxillanges et comptait un effectif de quelques moines (4 en 1286) dirigés par un prieur également seigneur des lieux.
L’église Ste-Marie, ancienne église paroissiale, a été construite à l’époque carolingienne et reconstruite au XIIe siècle. À la Révolution, elle est décrétée bien national : le conventionnel Rudel de Miral la racheta et l’utilisa comme grange. Transformée ensuite en chais, elle est aujourd’hui le lieu de vente des vins des « Caves de l’Abbaye ».
La place séparant Ste-Marie et St-Julien est l’emplacement de l’ancien cimetière (déménagé au Nord de St-Julien) : devenu lieu d’échange, une halle au blé y fut édifiée en 1880.
En face de cette halle, se trouve la Mairie de Chauriat qui était à l’origine la maison de Rudel du Miral. Né à Chauriat en 1719 dans une famille de notables, Claude-Antoine de Rudel fut avocat au Parlement de Paris, et de longues années, maire de Thiers. Député à la Convention en 1792, à l’âge de 73 ans, il est célèbre pour avoir voté la mort de Louis XVI. Il mourut à Rudel en 1807. Il était franc-maçon, et sa demeure était ornée de ses symboles.
L’église St-Julien. Les bâtiments de St-Julien élevés au XIIe siècle ont subi les conséquences de l’histoire mouvementée de Chauriat : crises avec les habitants, tremblements de terre… Saint Julien est une église typique de l’architecture romane de Basse Auvergne ; elle est néanmoins incomplète comparée aux églises romanes majeures auvergnates, ayant « perdu » son chevet du XIIe siècle (séisme) et son clocher originel.
On remarque, sur sa façade Sud, qu’elle possède, comme ces églises majeures :
– un massif barlong (= allongé transversalement) à la croisée de la nef et du transept (faux transept) ; orné d’arcades cintrées aveugles, il possède 2 toits en appentis ;
– un clocher octogonal (reconstruit en 1883) dont chaque face est percée de fenêtres géminées, celles du dernier étage étant surmontées d’un cordon de billettes ;
– des contreforts qui épaulent la façade le long de la nef, tandis que le transept est percé de fenêtres bordées d’un cordon de billettes et logées sous de grands arcs saillants qui ont « disparu » au fil du temps (un fragment est visible sur une travée de la nef de la façade Nord).
Cette façade Sud est réputée pour sa décoration de modillons à copeaux, de cordons de billettes et surtout de mosaïques de pierres volcaniques : celles-ci sont particulièrement développées sur le mur pignon du « faux » transept, au dessus des 4 grandes baies : grande mosaïque de pierres polychrome figurant des rosaces et des motifs géométriques. Cette décoration a fait l’objet d’une restauration effectuée au XIXe par Mallet, un « élève » de Violet le Duc.
La façade principale de l’église est constituée d’un mur-pignon flanqué de quatre contreforts. En son centre, se trouve une porte cintrée ornée de motifs décoratifs. Dans la partie haute de la façade une baie cintrée est entourée de colonnettes et surmontée d’un décor géométrique.
La nef est construite sur un unique niveau d’élévation (la voûte ayant été reconstruite plus basse après au séisme du XVe siècle, les tribunes ont disparu). Longue de 38 m et large de 5 m, cette élévation est constituée de grandes arcades donnant accès aux bas-cotés par 4 travées (la 1ère = narthex). Elle est couverte en berceau brisé, et rythmée de doubleaux en arcs brisés reposant sur des colonnes à chapiteaux : ces colonnes sont engagées dans des piles cruciformes aux extrémités. Les bas-cotés sont voûtés d’arêtes et scandés d’arcs doubleaux.
À la croisée du transept, se trouve une coupole sur trompes (petites voûtes en cul de four permettant de passer du plan carré au plan octogonal du clocher) ; et les 2 croisillons du transept sont dotés de 2 absidioles ou chapelles orientées vers l’Est (celle du croisillon Sud abrite la « statue miraculeuse » de Ste-Marcelle.
Le chœur et ses bas côtés sont surélevés et à travées droites, ce qui correspond au chevet plat reconstruit au XVe siècle.
C’est au milieu du XIXe siècle que, comme à Issoire, l’église a été entièrement peinte.
Le mobilier comprend dans le choeur un retable en bois du XVIIIe siècle : il abrite une Vierge romane du XIe siècle, perdue pendant la Révolution et retrouvée, très abîmée, en 1885 : elle a été récemment restaurée.
Parmi les chapiteaux, on remarque :
– une Cène (ou la multiplication des pains) avec un Christ à la tête plus grosse que celles des apôtres qui bénit l’assemblée, et suivie d’un lavement des pieds, et d’un ange avec 2 femmes (annonce de la Résurrection) ;
– un montreur de singe : un homme tire un singe par une corde passée au cou : représentation du « bon chrétien » qui dompte, par sa foi , le diable à figure de singe.
Compte-rendu de Françoise Robert
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en Toscane d’Auvergne