St Bonnet le Bourg (photo P. Terras – Grahlf)

Estivales 2013 – Quelques églises romanes en Livradois

La seconde sortie du GRAHLF est consacrée aux visites de cinq églises romanes du Livradois : Saint Pierre d’Arlanc, Dore l’église, Doranges, Saint Bonnet le Bourg et Saint Sauveur la Sagne.

Ces édifices ne se remarquent pas par une imposante architecture à l’image de Brioude ou Saint Nectaire.

Leurs plans présentent un chœur doté parfois d’une abside voûtée en cul de four, d’absidioles, d’un carré de transept dominé par une coupole sur trompe et de croisillons de transept plus ou moins accentués.

Toutefois leurs sculptures grossières à caractère souvent profane présentent un certain intérêt car il perdura en Auvergne.

La guide qui accompagna le groupe durant la journée porta essentiellement son attention sur la signification des chapiteaux. Ceux-ci sans réel programme iconographique ne comportent pratiquement aucun thème savant à l’exception du péché originel à Saint Pierre d’Arlanc et de Daniel dans la fosse aux lions, personnage récurant surtout dans les églises affiliées à Saint Michel de Cluse. Dans leur ensemble ils restent dans le domaine du paganisme et des thèmes profanes liés à la nature comme des griffons affrontés, des acrobates, des masques crachant des feuillages (la mauvaise parole) ou des sirènes représentant le mal. Il faut noter aussi quelques chapiteaux à crochets. Ces thèmes se retrouveront également dans les modillons. D’une manière générale l’extérieur d’une église romane représente par ses sculptures un monde dangereux, le monde du paganisme, le monde impur tandis que l’intérieur du sanctuaire (passage par le baptême) offre une perspective de salut.

Saint-Pierre d’Arlanc

St Pierre d’Arlanc (photo P. Terras – Grahlf)

Le prieuré était affilié à Saint Michel de la Cluse. La façade Ouest présente de nombreux remaniements. L’ordonnance de la façade comprend trois parties, la zone centrale jusqu’au fronton, rappelle la structure de l’église primitive, puis de part et d’autre de celle-ci apparaissent les collatéraux et enfin une surélévation bien visible grâce à l’appareillage différent.

A l’étage haut, sous le fronton triangulaire, deux baies aveugles encadrent une fenêtre. En dessous, une grande fenêtre éclaire la nef centrale, tandis que deux petites baies à ébrasement intérieur donnent de la lumière aux bas-côtés. Celle du Nord est surmontée d’un sourcil orné de billettes.

Le fronton fut rehaussé très maladroitement et sa symétrie rompue. En particulier les quatre colonnes monolithes et leurs chapiteaux sculptés de feuilles seraient du remploi de matériaux disponibles. L’une de ces colonnes est creusée de gorges spiralées.
Le chevet retient également l’attention.

L’abside et les absidioles, couvertes de lauzes, sont renforcées par un bandeau continu qui fait sourcil au dessus des ouvertures primitives et sert de larmier ailleurs. La corniche supérieure repose sur des modillons sculptés de divers motifs ornementaux ou de visages.

Autour du chœur se trouvait l’ancien cimetière qui fut supprimé en 1776 sur ordre de l’évêque consécutivement à de fortes épidémies.

A l’origine il s’agissait d’une église à nef unique. Les murs furent élargis par de grands arcs de décharge prenant naissance sur des impostes encore repérables. L’épaisseur des murs primitifs, moins de quatre vingts centimètres, laisse penser que l’édifice n’était pas voûté.

L’église romane qui lui succéda comportait un vaisseau central de trois travées, de douze mètres de hauteur, voûté en plein cintre. Des arcs doubleaux marquent chaque travée. Ils sont reçus sur des chapiteaux sculptés couronnant des colonnes engagées sur un noyau quadrangulaire. Ces chapiteaux sont ornés de feuillage mais on y reconnaît également quelques visages énigmatiques, un petit souffleur de trompe, des griffons très détaillés avec un corps trapu, d’aspect assez neutre dans l’expression et la sirène de la luxure si fréquente dans l’iconographie auvergnate.

Le vaisseau principal, très bien éclairé, s’ouvre sur des bas-côtés voûtés d’arêtes.

Probablement au début du XIIIe siècle, un effondrement exigea la reconstruction du bas-côté Nord, désormais plus élevé que son homologue Sud.

A cette même époque la nef centrale ainsi que le transept furent revoûtés. De part et d’autre du carré de transept les croisillons sont voûtés en demi-berceau afin, peut-être de contrebuter la souche du clocher, les croisillons se terminent par un voûtement en croisée d’arêtes. Dans la croisée de transept figurent des « départs de coupole ». Il est probable que la coupole ne fut jamais construite. Le poids du clocher déforma les colonnes du carré de transept.

Le vaisseau central et les collatéraux se terminent sur des chapelles absidiales voûtées en cul de four. L’abside centrale, plus vaste, était éclairée primitivement par trois fenêtres aménagées entre trois des sept arcatures décorant l’ensemble. Une seule baie, légèrement désaxée, éclaire les absidioles.

Dore l’église

Dore l’église (photo P. Terras – Grahlf)

Comme dans toute église romane la façade ouest donne le plan intérieur du sanctuaire.

Le mur pignon est construit en gros appareil assez régulier. L’ouverture comprend d’abord un arc au tracé légèrement brisé sur sa partie supérieure, les moulures d’archivolte sont décorées de motifs très réalistes (fleurs de lis, chevaux, serpents).

Il faut remarquer les très belles portes de réemploi et les ferrures. L’ensemble fait l’objet d’une histoire légendaire entre un curé lassé d’attendre la venue d’un seigneur du château de Bellefille toujours en retard aux offices !

Le mur nord présente une importante série de modillons à caractère géométrique, ou orné de boules, d’une tête zoomorphe et enfin du côté Nord Ouest (du même mur) d’une jolie tête humaine très détaillée avec un front large, des yeux exorbités, des pommettes saillantes qui tire langue.

L’architecture intérieure est beaucoup plus simple qu’à Saint-Pierre-d’Arlanc. La nef axiale comporte trois travées séparées par des arcs doubleaux reposant sur des colonnes engagées à chapiteaux. L’éclairage est aussi beaucoup plus sommaire.

Sur la façade Sud il faut s’arrêter devant un vitrail représentant la Mère de Dieu en pied logé dans un encadrement flatteur. La Vierge, une jeune femme au beau visage, aux traits très fins tient dans ses bras un bambin joufflu et potelé tourné de face.

Doranges

Doranges (photo P. Terras – Grahlf)

La nef fut rehaussée comme le laisse apparaitre la position des modillons. Le portail se trouve sur la façade sud ainsi que dans les deux églises suivantes.

Saint-Bonnet-le-Bourg

St Bonnet le Bourg (photo P. Terras – Grahlf)

La comparaison des appareillages situés au-dessus du portail permet d’affirmer que la nef fut rehaussée, les modillons étant modernes.

Le portail est voûté en berceau plein cintre avec un tympan sculpté de petites palmettes. La moulure d’archivolte comprend des palmettes taillées en réserve. La moulure est reçue par deux petites têtes.

L’arc interne s’appuie sur quatre chapiteaux. Le plus extérieur représente des griffons affrontés dont la queue est relevée sur le dos et la bouche entrouverte. Ils se tiennent par les pattes et ne semblent pas menaçants. Toute la sculpture est en réserve ce qui lui enlève du relief. Toutefois le jeu de courbes et de contrecourbes donne une sensation de mouvement à ce beau travail. Vient ensuite un chapiteau de type corinthien avec de belles volutes à l’intérieur desquelles se loge une petite tête d’animal aux yeux gravés au trépan.

Sur l’autre côté deux oiseaux boivent à la même coupe. Un serpent s’enroule autour des pattes.

Le dernier chapiteau revient à un thème profane avec des feuillages et deux, voire trois têtes, aux angles.

La nature de la pierre, peut-être une arkose, assez tendre permet une sculpture plus détaillée et précise. A l’intérieur les chapiteaux peints donnent une préférence à la représentation animalière.

Saint-Sauveur-la-Sagne

St Sauveur La Sagne (photo P. Terras – Grahlf)

Le prieuré fut fondé en 915 par Guillaume le pieux, comte d’Auvergne. Le prieuré affilié à l’abbaye de Saint-Michel-de-Cluse dépendait temporellement de la seigneurie de Clavelier. En 1252 il passa par un mariage de la famille de Polignac à celle de Saint Nectaire. Le prieuré fut détruit à la Révolution.

Le prieur avait le droit de basse justice. L’église en elle-même date du XIIe siècle. La visite épiscopale du 2 octobre 1777 la considère en bon état.

Sur la façade occidentale se trouvent deux baies l’une en plein cintre l’autre en arc brisé et au-dessus le clocher de souche carré. Il s’appuie sur l’extrémité occidentale de la nef gothique.

Seul le chœur est roman. L’abside, construite en gros appareil régulier, présente des baies en plein cintre surmontées d’un petit sourcil. Chaque baie comporte deux colonnes à chapiteaux dont les corbeilles représentent notamment des feuilles d’eau surmontées d’une petite volute et une sirène bifide. Un bandeau part des baies et enjambent les contreforts.

Quelques jolis modillons agrémentent le dessous de la corniche, comme, par exemple une tête animale aujourd’hui partiellement endommagée, une tête zoomorphe aux yeux globuleux, une tête ou même un masque crachant des feuillages et surtout un modillon à copeaux bien suggérés par d’élégants enroulements.

A l’intérieur il faut noter la forme très allongée des corbeilles des chapiteaux réalisées ainsi afin de maintenir l’équilibre artistique de l’ensemble.

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